"C'est une victoire de l'Egalité sur la peur, le préjugé et l'ignorance", s'est félicitée l'avocate parisienne de l'enseignante, Me Caroline Mécary.
Dans son arrêt, la Cour européenne "considère que la requérante a fait l'objet d'une différence de traitement" et souligne que cette différence qui se rapporte uniquement à l'orientation sexuelle "constitue une discrimination au regard de la Convention".
"L'influence de son homosexualité sur l'appréciation de sa demande est non seulement avérée, mais a également revêtu un caractère décisif", indique encore la Cour dans son arrêt.
Par dix voix contre sept, les juges européens de la Grande chambre ont donc conclu à la violation de l'article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l'homme. Ils ont alloué 10.000 euros à la requérante pour dommage moral.
L'arrêt aura des conséquences importantes pour tous les célibataires homosexuels car désormais "la France ne peut plus refuser un agrément à une personne célibataire en raison de son homosexualité et il en sera de même pour tous les autres pays membres du Conseil de l'Europe", souligne Caroline Mécary.
Le droit français, rappellent les juges européens, autorise déjà l'adoption d'un enfant par un célibataire, ouvrant ainsi la voie à l'adoption par une personne célibataire homosexuelle. La France n'aura donc pas à modifier sa législation pour se conformer à la décision obligatoire de la Cour, mais elle devra modifier l'interprétation et la mise en pratique de ses propres textes, selon les juristes européens.
Lors de la procédure devant la Cour européenne, la Fédération Internationale des ligues des Droits de l'Homme (FIDH), l'ILGA-Europe (the European Region of the International Lesbian and Gay Association), l'Association des Parents et futurs Parents Gays et Lesbiens (APGL) et la British Agencies for Adoption and Fostering (BAAF) avaient été autorisées à intervenir en qualité de tiers intervenants, une procédure exceptionnelle.
La requérante, qui protège son anonymat sous les initiales E.B., est institutrice dans une école maternelle dans le Jura. Aujourd'hui âgée de 45 ans, elle vit depuis 1990 avec une psychologue.
Souhaitant adopter un enfant, elle a essuyé un refus de la part des services départementaux qui ont invoqué un défaut de "repères identificatoires" dû à l'absence de référent paternel et l'ambiguïté de sa compagne par rapport à une éventuelle adoption.
Les juridictions françaises ont confirmé le refus d'adoption, estimant que cette décision n'était pas fondée sur le choix de vie de la requérante, mais avait tenu compte des besoins et de l'intérêt d'un enfant adopté.
L'enseignante s'estimait victime d'une violation des articles 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et 14 (interdiction de la discrimination) de la convention européenne des droits de l'Homme.
> HES : l'Europe au service de l'égalité des droits
Homosexualités et Socialisme (HES) se réjouit de la décision rendue par la Cour européenne "qui place le gouvernement français devant ses responsabilités". "Le débat doit désormais s'ouvrir au Parlement", estime HES qui rapelle que es députés socialistes ont déposé, dès 2006, et à nouveau le 15 janvier 2008, une proposition de loi visant à aménager les conditions d'exercice de la parentalité. Cette proposition prévoit en particulier l'ouverture de l'adoption aux couples de même sexe.
Rappelant que ce sont les Conseils généraux qui sont chargés de la procédure d'agrément pour adoption, Homosexualités et Socialisme invite les candidats aux élections cantonales à s'exprimer pendant la campagne. "S'engagent-ils à ne jamais retenir le critère de l'homosexualité pour refuser l'agrément pour adoption ?", interroge HES.
Source gay : Ellico.com