Les prochaines législatives vont sans doute être l'occasion aborder la question de l'union civile pour les homosexuels. Quel processus pourrait aboutir au vote d'une telle loi? C'est le gouvernement qui décide de l'ordre du jour des séances et de quelles lois seront discutées. Les lois, validées par le Conseil d'État, peuvent être d'origine gouvernementale, sous la forme d'un projet de loi, ou parlementaire: une proposition de loi présentée par un ou plusieurs députés. Au final, dans ce deuxième cas, c'est le gouvernement qui décide si oui, ou non, la proposition sera soumise à la discussion. Bien sûr, le gouvernement choisira plutôt des propositions émanant de son bord politique, et c'est ce camp qui a la majorité pour l'adopter ensuite. Mais les projets d'un gouvernement entrant s'inspirent de propositions qui avaient été déposées, auparavant, dans l'opposition. Enfin, le troisième moyen pour adopter un texte est un simple amendement, voté dans le cadre d'une loi plus générale.
Vous étiez secrétaire des débats à l'Assemblée nationale, au moment où la proposition de loi sur le pacs a été débattue. Quel souvenir en gardez-vous? C'était un débat mémorable, pour plusieurs raisons. D'abord le 9 octobre 1998, avec le vote d'une exception d'irrecevabilité, une motion présentée par Jean-François Mattei qui fait tomber, à la surprise générale, la proposition de loi sur le Pacte civil de solidarité. Avec la logique majoritaire de la cinquième république, un tel rejet d'un texte, porté par la majorité, est tout à fait rarissime. Mais tous les députés de gauche n'étaient pas là pour le soutenir (les jours précédents, un débat sur l'agriculture avait mobilisé des députés qui étaient repartis ensuite dans leur circonscription, et les députés de droite étaient venus à Paris pour d'autres raisons). D'emblée, cela a créé un électrochoc. Une deuxième mouture du même texte, très peu différente, est alors déposée mi-octobre, malgré les foudres de l'opposition. C'est celle-là qui sera finalement retenue. Le débat commence enfin, très long et controversé: 15 séances sont consacrées au pacs jusqu'à décembre 1998, y compris le week-end. Certains incidents sont restés dans l'histoire du Parlement: la bible brandie par Christine Boutin dans l'hémicycle, ce que certains considèrent comme une atteinte à la laïcité, la garde des Sceaux, Élisabeth Guigou, feuilletant ostensiblement un livre pendant qu'un député parlait… Durant cet épisode, les amendement sont utilisés comme un moyen de ralentir les débats –il y en eut des milliers, certains même provocateurs, comme celui visant à étendre le pacs aux animaux de compagnies–. Cela en fait l'un des débats les plus virulents et les plus conflictuels de la cinquième république.
Le député Christian Vanneste a été condamné pour des propos homophobes en 2004. Il les avait prononcés à l'Assemblée et avait été condamné pour les avoir réitérés dans la presse. Faites-vous un parallèle entre ces deux époques? Effectivement, un député étant présumé «irresponsable», il ne peut être poursuivi pour des propos en séance. Mais autant que je me souvienne, il s'agissait d'un personnage isolé dans ses propos. Le débat de 2004 sur la création de la Halde et la pénalisation des propos homophobes n'a pas eu la même virulence que celui sur le pacs.
Bruno Fuligni est l'auteur de Les Quinze mille, députés d'hier et d'aujourd'hui, Horay.
Source gay : Tetu.com
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